Retraduire les classiques de la littérature se fait depuis toujours mais a presque des airs de tendance à l’heure actuelle. En plein essor, la retraduction de livres est-elle une simple mode, qui dépasserait potentiellement les limites du bon sens, ou bien correspond-elle à une nécessité réelle afin que les textes traduits soient les plus fidèles possibles à l’œuvre d’origine ? Voici quelques éléments de réflexion.
La traduction, un exercice toujours insatisfaisant ?
Le succès de la littérature étrangère s’appuie sur deux piliers dont le genre est totalement dépendant : les choix des éditeurs de proposer certains textes à la vente et la qualité des traductions qui les accompagnent. Impossible, en effet, pour la population générale d’accéder aux œuvres si elles ne sont pas traduites dans la langue du pays dont elles essayent de pénétrer le marché.
Quand on se demande pourquoi retraduire un livre, c’est donc d’abord pour chercher à toujours mieux coller au texte d’origine. On sait à quel point la traduction est un jeu d’équilibriste, avec des nuances propres à la langue source et qu’il est parfois extrêmement difficile de conserver dans la langue cible. Traduire, c’est faire des choix en permanence, c’est d’une certaine manière un travail de création (on parle d’ailleurs de transcréation).
Or, un traducteur différent peut avoir un autre regard et des idées nouvelles en termes de lexique par rapport à un prédécesseur, et cela peut le pousser à proposer une retraduction pertinente. Du point de vue des traducteurs, proposer une nouvelle traduction d’un texte classique permet de lui offrir une seconde vie : il est présenté sous une nouvelle forme au public, qui peut ainsi le redécouvrir.
Par ailleurs, les spécialistes estiment que tout texte doit être retraduit deux fois par siècle environ, car la langue cible évolue et vieillit. Tout en restant fidèle au texte d’origine, on peut être amené à faire des choix différents dans le vocabulaire ou la syntaxe, ce afin de continuer à toucher le public sans que la traduction tombe en désuétude. C’est la raison pour laquelle les œuvres littéraires continueront à être traduites et retraduites au fil du temps.
Retraduire pour proposer une traduction de meilleure qualité
L’autre grand avantage de la retraduction est que cela permet de rectifier d’éventuelles erreurs ou maladresses identifiées dans la traduction première. Cela peut être tout à la fois un passage mal compris par le traducteur, qui choisit donc de mauvais termes dans sa langue et fait perdre au lecteur le sens du texte, comme un style d’écriture spécifique à l’auteur et qui se perd dans une traduction qui ne parviendrait pas à le conserver dans la langue cible.
Cette démarche existe depuis la nuit des temps. Dès le Moyen Âge, de nouvelles traductions furent réalisées sur de grands textes classiques, à commencer par la Bible. Avec 265 traductions en français, le Cantique des cantiques détient le record absolu des retraductions au fil des siècles !
Aujourd’hui encore, un éditeur peut tout à fait estimer pertinent de refaire traduire un recueil de poèmes, un roman ou un essai afin de le republier avec une qualité qu’il espère meilleure. L’un des exemples les plus marquants de la littérature est Kafka, dont les premiers romans l’ont, certes, fait connaître du grand public mais avec au passage d’importantes erreurs de traductions allemand-français qu’il fallait corriger en proposant une nouvelle version.
Rendre le texte traduit plus moderne
Dans certains cas, la retraduction est réalisée afin de corriger un problème plus profond. Certains textes littéraires ont en effet pu être censurés au moment de leur première publication traduite (on pense notamment à la littérature russe à l’époque soviétique) et il est possible de réaliser une traduction plus fiable lorsque le temps a fait son œuvre. Il s’agit là de restaurer la vérité d’un texte qui serait parvenu à ses lecteurs internationaux de façon tronquée.
Sans aller jusque-là, il y a des modes dans la traduction et celles-ci peuvent avoir mené à des choix discutables. À une époque, en effet, les traducteurs francisaient les noms dans les romans étrangers ou bien optaient pour un français classique indépendamment du style d’origine, faisant donc perdre ce que l’auteur pouvait avoir d’ironique ou de torturé dans son style d’écriture. La traduction, aujourd’hui, se veut beaucoup plus fidèle à tout ce qui constitue le cœur d’un texte.
Une volonté d’inclusivité dans certaines retraductions
La retraduction est aussi une démarche moderne car elle est parfois réalisée dans le but de rendre le roman plus inclusif et plus en phase avec les valeurs aujourd’hui bien ancrées dans nos sociétés. Des romans anciens peuvent en effet nous apparaître choquants par leur décalage avec la morale actuelle et il est parfois intéressant de les adapter en passant par une nouvelle traduction.
Le travail du traducteur ne s’arrête pas au simple passage d’une langue à une autre : il réalise en effet tout un travail autour de l’œuvre et peut proposer, par exemple, d’annoter le récit pour le remettre dans le contexte historique et apporter les explications nécessaires au lecteur d’aujourd’hui.
Se pose également la question de l’écriture inclusive. Elle a fait peu d’émules en traduction, en revanche le traducteur peut être amené à repenser certains passages à l’aune de la neutralité de genre. Là encore, les notes de bas de page peuvent être un support très intéressant, mais cela peut aussi passer par le choix d’un terme ou d’une tournure de phrase permettant de gommer la prédominance du masculin. Il convient en revanche de ne pas déformer les propos originels, et c’est là que tient toute la complexité du travail du traducteur s’il a la volonté de rendre son texte plus inclusif.
La dérive commerciale des retraductions
Attention toutefois, car cela peut devenir une démarche purement commerciale. La retraduction de livres bascule en effet dans la mode quand la démarche n’est pas véritablement littéraire ou linguistique, mais motivée par des raisons moins éthiques. Tous les romans nécessitent-ils d’être plus inclusifs ? Absolument pas. Toutes les œuvres anciennes ont-elles besoin d’être retraduites régulièrement ? Non plus.
Et pourtant, quand l’œuvre d’un écrivain tombe dans le domaine public, on voit fleurir une large offre de retraductions, sans que cette nouveauté soit toujours nécessaire. Il peut arriver également qu’un éditeur passe commande d’une retraduction à un écrivain célèbre : celui-ci a beau ne pas être traducteur de métier, son travail fera vendre, et ce quelle qu’en soit la qualité. Cela devient un événement d’édition plus qu’une réelle recherche de qualité dans la traduction et c’est certainement la limite à ne pas dépasser.
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